L’anxiété de séparation peut mettre en difficulté le lien homme-chien, à travers des vocalisations excessives, des destructions et dommages domestiques (parfois des réparations très couteuses), ainsi que des conséquences lourdes comme l’abandon ou parfois même l’euthanasie. L’incidence des problèmes de comportement liés à la séparation a été estimée à environ 20 % de la population canine. Il est nécessaire, en tant qu’éducateurs comportementalistes canins, de comprendre l’origine cette anxiété et d’aider nos clients et leurs compagnons à quatre pattes.

Qu'est-ce que l'anxiété de séparation chez le chien ?

L’anxiété de séparation a été définie comme une détresse en l’absence de l’être d’attachement.

L’anxiété de séparation chez les chiens est un problème comportemental très fréquent, caractérisé par de l’anxiété et de la détresse lorsqu’un chien est loin de la personne (ou des personnes) à laquelle il est lié. Le chien anxieux manifeste souvent une excitation excessive, un comportement collant et de l’agitation au retour de son humain.

Il est important de noter que la présence d’autres animaux dans le foyer n’atténue pas la détresse du chien anxieux.

Anxiété de séparation chez les chiens : les causes

La cause exacte de l’anxiété de séparation chez les chiens n’est généralement pas connue. Cependant, des facteurs génétiques et environnementaux, ou des expériences négatives précoces dans la vie d’un chiot, peuvent contribuer au développement de l’anxiété de séparation.

Bien que les recherches soient équivoques, il semble que les chiens développent des problèmes de comportement liés à la séparation s’ils sont mâles, proviennent de refuges ou ont été trouvés errants, s’ils sont séparés de leur portée avant l’âge de 60 jours, et ont un tempérament plus anxieux.

C’est pourquoi les facteurs de prévention sont essentiels, tels que : 

  • un large éventail d’expériences en dehors de la maison,
  • des rencontres avec d’autres personnes, entre l’âge de 5 et 10 mois,
  • des routines de vie stables,
  • une accoutumance progressive aux absences du propriétaire,
  • l’évitement des punitions.

Les facteurs favorisant l'anxiété de séparation chez les chiens peuvent être :

  • L’attitude et les actions d’une personne envers le chien, comme le renforcement négatif ou la punition.
  • Les changements dans la dynamique familiale, comme le décès d’un membre de la famille.
  • Le placement.
  • Changement de statut du travail : télétravail ou travail à l’extérieur.
  • La frustration ou l’ennui dû à un manque d’activités et de ressources enrichissantes (jouets, nourriture, temps de jeu, exercice physique adéquat…).

Les chiens plus âgés sont plus susceptibles de développer une anxiété de séparation,
car ils sont moins capables de faire face aux changements dans leur environnement.

Anxiété de séparation chez les chiens : les symptômes

Les chiens souffrant d’anxiété de séparation présentent des symptômes en l’absence de leur être d’attachement, de gravité diverse, et souvent même avant leur départ :

  • Comportement collant, diminution de l’activité, diminution de l’appétit
  • Comportements destructeurs, tels que : mâcher (surtout les accès : fenêtres, portes…), griffer, détruire des objets ménagers, parfois automutilation (toilettage excessif).
  • Comportement agité, tel que : haleter, faire les cent pas, tentative de fuite, hypersalivation, frissons ou tremblements, uriner ou déféquer dans la maison, vocalisation (hurler, aboyer ou gémir), vomissements, diarrhées…

Les réactions du chien peuvent aller d’une légère détresse, comme faire les cent pas et gémir, à une anxiété extrême, avec risque de blessure lorsqu’ils tentent de s’échapper de leur confinement et de retrouver « leurs » personnes.

Le Dr Vétérinaire Karen Overall a décrit un chien qui a détruit des cloisons sèches, des carreaux et de l’isolation dans une maison. Ce chien s’est déchiré la langue, s’est cassé les dents et s’est coupé le visage et les pattes.

Comment aider un chien souffrant d’anxiété de séparation ?

Aider un chien à surmonter l’anxiété de séparation demande du temps et de la patience, en utilisant toujours des techniques d’apprentissage par renforcement positif.

Le traitement le plus efficace des problèmes liés à la séparation chez les chiens peut être la modification du comportement*, qui se concentre sur la désensibilisation systématique et le contre-conditionnement, pouvant être complétés par la prescription de médicaments par le vétérinaire.

*après analyse du comportement en absence grâce à l’analyse de vidéos, et consultation vétérinaire pour éliminer des affections organiques comme les pathologies thyroïdiennes.

Ne jamais punir le chien en rentrant dans une maison victime de destruction, pour ne pas accroître son anxiété et aggraver les comportements indésirables. 

De plus, la punition infligée au retour du propriétaire est peu susceptible d’être temporellement contingente au comportement problématique et est donc complètement inefficace. Les chiens sont moins anxieux lorsqu’une proportion élevée de leurs interactions d’entraînement implique un renforcement positif.

Traitements de l'anxiété de séparation canine

La meilleure façon d’aider un chien souffrant d’anxiété de séparation est de changer définitivement sa perception de ce que signifie être seul, très progressivement au rythme de l’animal.

Deux techniques sont utilisées :

  1. La désensibilisation systématique
  2. Le contre-conditionnement

La désensibilisation systématique

Elle consiste à exposer le chien à des versions atténuées du stimulus redouté, ne provoquant pas d’anxiété, puis à augmenter progressivement l’intensité du stimulus.

Travailler au début des durées d’absence très courtes pour garantir que l’absence de la personne ne soit pas associée à des comportements problématiques et, vraisemblablement, à l’anxiété.

Ainsi, il est conseillé au propriétaire de laisser le chien, au départ, pendant quelques secondes seulement, puis de rentrer dans la maison ou la pièce et de le féliciter. La durée de la séparation est progressivement augmentée jusqu’à ce que la période d’absence souhaitée soit atteinte sans que le comportement problématique ne se reproduise. En répétant ces courtes absences à plusieurs reprises, on s’assure que le comportement non anxieux se généralise à des durées plus longues.

La désensibilisation systématique est souvent utilisée en même temps que le contre-conditionnement, qui consiste à associer le stimulus aversif à une réponse plaisante en utilisant des techniques de conditionnement classique.

Le contre-conditionnement

Le concept sous-jacent au contre-conditionnement est que les états émotionnels comme l’anxiété sont incompatibles avec d’autres activités telles que la relaxation et le fait de manger.

Selon Basso & Miller, la présentation de nourriture devrait inhiber l’anxiété du chien et augmenter sa relaxation. Donner des jouets farcis de nourritures, tels les « Kong » fourrés  de steak haché congelés en l’absence de l’être d’attachement, avec des durées croissantes.

Tout d’abord prévoir de l’exercice physique, masticatoire et mental.

Enseigner tout d’abord au chien des comportements apaisants, tels que « se calmer », en le récompensant lorsqu’il se détend (muscles faciaux détendus, respiration régulière et lente, assis avec une patte repliée sous le corps, oreilles sur le côté ou en avant par exemple). dans un endroit spécifique, comme un tapis ou une cage ouverte (les chiens peuvent se blesser dans leurs tentatives de s’échapper de la cage) et en augmentant progressivement le temps qu’il y passe, puis en s’éloignant progressivement jusqu’à la porte d’entrée, en utilisant la technique des « 3 D » (durée/distance/distractions).

Modification comportement - Exemple d’étapes à renforcer

  1. Renforcer un moment bref de relaxation.
  2. Renforcer le « pas bouger » avec une durée de 5, 10, 15 et 30 sec.
  3. Renforcer le « pas bouger » quand la personne prend ses clefs et s’assied.
  4. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire met ses chaussures, prend son sac, et s’assied.
  5. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire touche la poignée de porte.
  6. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire actionne la poignée de porte.
  7. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire ouvre la porte et la referme rapidement.
  8. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire ouvre la porte, franchit la porte en restant visible.
  9. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire franchit la porte, partiellement fermée, et revient de suite.
  10. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire franchit la porte entièrement fermée et revient de suite.
  11. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire, franchit la porte entièrement fermée et revient après 5 secondes.
  12. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire est à l’extérieur, porte fermée en augmentant la durée : 10, 20, 30, 45 et 90 secondes.
  13. Renforcer le « pas bouger » quand le propriétaire est à l’extérieur, porte fermée en augmentant la durée : 2, 3, 4, 5, 7 et 10 mn.

Il est important également de désensibiliser les signaux préalables au départ (récupérer ses clefs, mettre des chaussures, prendre son sac, mette un manteau, se diriger et ouvrir la porte d’entrée, etc.) en le renforçant toujours sur le même tapis d’entraînement.

L’entraînement doit se concentrer non seulement sur la réponse comportementale, mais aussi sur l’état émotionnel du chien, en mettant l’accent sur un comportement calme et détendu. Pensez à offrir au chien anxieux une friandise de très haute valeur, longue à mâcher, lors des préparations de la personne avant son départ.

Médication prescrite par un vétérinaire

En cas d’une anxiété de séparation sévère, il est recommandé de prendre des médicaments avant de commencer les protocoles de désensibilisation.

Dr Vet Charlotte Ercolano*  affirme que les médicaments peuvent être utilisés pour aider les chiens souffrant d’anxiété de séparation en fonction du seuil de l’anxiété de chaque individu et de sa mise en danger : Phéromones, Homéopathie, Phythothérapie, Anxiolytiques (le chien se met en danger, devient réactif avec les autres animaux du domicile, détruit…avec une qualité de vie compromise).

*« Les médicaments sont utilisés en complément de l’entraînement dans tous les cas en diminuant l’ anxiété générale, ce qui permet à l’entraînement et l’apprentissage d’être plus efficaces ».

Une routine quotidienne cohérente peut aider le chien à établir des attentes quant au moment où il recevra de l’attention et au moment où il sera seul.

Conclusion 

L’objectif de la modification du comportement est d’apprendre au chien qu’être seul n’est pas une mauvaise chose, pour augmenter sa confiance en lui, augmenter progressivement le temps où il est seul. Cela demande de la patience et constitue souvent la partie la plus difficile de la modification du comportement. Les médicaments anxiolytiques (médicaments réduisant l’anxiété), comme la fluoxétine, sont généralement utilisés à long terme, aidant souvent à abaisser le seuil émotionnel et à faciliter l’apprentissage dans le cadre du protocole d’anxiété de séparation », explique Tina Flores, KPA-CTP, formatrice certifiée en anxiété de séparation (CSAT).
L’anxiété de séparation ne peut être guérie, mais peut être gérée avec succès avec de la patience et de l’entraînement.
Il est essentiel de noter toutes les données recueillies dans un tableau pour évaluer objectivement les progrès du chien et programmer des ajustements éventuels au protocole.
L’objectif de la modification du comportement est d’apprendre au chien qu’être seul n’est pas une mauvaise chose, pour augmenter sa confiance en lui, augmenter progressivement le temps d’absence avec une meilleure qualité de vie.

​Afin de traiter les chiens de façon éthique, il est primordial que nous gardions à l’esprit l’éventail des devoirs positifs que cette relation engendre, y compris le devoir d’être à la hauteur de la confiance que les chiens placent en nous.

Pat Rérolle  

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Références :

    • October 2014, Veterinary Medcine Researc and Reports, 5(default):143-15, Rebecca Sargisson, University of Waikato, New Zealand
    • Butler, R, Sargisson, RJ and Elliffe, D 2011 The efficacy of sys-tematic desensitization for treating the separation-related prob-lem behaviour of domestic dogs. Applied Animal Behaviour Science 129: 136–145.
    • Can Vet J  2002 Mar;43(3):220–222  Behavior modification and pharmacotherapy for separation anxiety in a 2-year-old pointer cross, Michelle Lem Canada
    • How To Help a Dog With Separation Anxiety, Victoria Schade, CPDT-KA, Sep, 4, 2024, USA
    • Literature Review: Behavior Modification for Canine Separation Anxiety, Brian J.Burton, IAABC, USA

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